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Le tailleur de pierre

  • Photo du rédacteur: anne
    anne
  • 12 août 2020
  • 2 min de lecture

Dernière mise à jour : 15 août 2020

Je me prénomme Lupo et je suis tailleur de pierre. Je suis venu de mon Piémont natal pour exercer mon art. Le seigneur Humbert de Savoie, dit « le Bâtard », a décidé d’ériger une tour qui donnera prestige et splendeur à son château du bourg d’Estavayer. Citadelle imposante dotée d’un mur d’enceinte et de beffrois percés de meurtrières, elle fut construite pour résister aux assauts guerriers. Elle sera enrichie d’une haute tour carrée et d’annexes en briques rouges qui supporteront les pont-levis des entrées latérales.

Charpentiers, maçons, tailleurs de pierre, les artisans venus de ma contrée au-delà des montagnes s’activent avec cœur à la tâche. Mon travail, je l’ai appris avec un maître qui m’a enseigné la précision du geste, la perfection du détail. Sans minutie, point d’excellence. Durant mes rares moments de liberté, j’erre pour admirer l’ouvrage de ceux qui m’ont précédé en ces lieux. La beauté épurée des arches du pont qui enjambe les douves cernant la forteresse. Les ogives gracieuses des quelques fenêtres donnant sur le lac et qui permettent de contempler le massif du Jura. L’ensemble dégage force et harmonie.

Depuis les hauteurs du chantier, j’aime épier la vie qui règne en ces murs protecteurs. J’aperçois lors des beaux jours d’été, la dame du seigneur et sa suite flâner dans les jardins cachés. Les enfants chahutent alors que les précieuses se prélassent à l’ombre d’un lilas majestueux, profitant de la fraîcheur d’une pièce d’eau que bordent des vivaces aux larges feuilles. Nous, pauvres hères, devons supporter la brûlure du soleil tandis que les blocs de pierre que j’assemble péniblement chauffent impitoyablement.

Il aura fallu dix longues années de dur labeur pour terminer ces édifices selon les désirs de notre Sire. Satisfaction du travail accompli, nous repartons sur les routes pour perpétuer notre savoir-faire et laissons derrière nous une trace de nos modestes existences.


Anne, le 30.06.2014

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